Le niveau de vie moyen des retraités est meilleur que celui de l’ensemble de la population mais la situation pourrait bien s’inverser dans les prochaines décennies. C’est l’un des enseignements du treizième « rapport thématique » du Conseil d’orientation des retraites (COR), rendu public jeudi 17 décembre. Si ce phénomène de dégradation relative se confirmait, il constituerait une rupture de taille par rapport aux quarante-cinq dernières années.
En 2013, le niveau de vie moyen des retraités (qui tient compte de leurs pensions mais aussi d’autres types de revenus, comme ceux tirés du patrimoine, et des impôts) s’élève à 2 049 euros par mois. Il est quasiment égal à celui des personnes actives (2 062 euros par mois). Et il s’avère même supérieur à celui de toute la population (1 946 euros par mois)
C’est le résultat de tendances de fond, qui ont prévalu de 1970 jusqu’au milieu des années 1990. Durant cette période, souligne le COR, les régimes de retraite sont montés en charge et l’activité féminine a nettement progressé, ce qui s’est traduit « par l’arrivée à la retraite de générations ayant acquis davantage de droits à la retraite que leurs aînés ».
Par la suite, de 1996 jusque vers 2010, les niveaux de vie des retraités, des actifs et de l’ensemble de la population ont connu des évolutions à peu près parallèles, avant de diverger un peu, sous l’effet de la crise et d’une pression fiscale accrue. Deux facteurs qui ont moins touché les personnes ayant cessé leur vie professionnelle.
D’autres indicateurs mettent en exergue l’amélioration spectaculaire du sort des retraités. Le pourcentage de ceux qui sont pauvres a fortement baissé à partir de 1970, passant « en deçà de celui de l’ensemble de la population dans les années 1980, puis en deçà de celui des actifs (en emploi ou au chômage) dans les années 1990 », constate le COR. En 2013, le taux de pauvreté des retraités atteint 7,9 % contre 14 % pour toute la population.
Si le regard se tourne vers l’étranger, les comparaisons sont clairement à l’avantage des retraités français. En 2012, les ménages de plus de 65 ans vivant dans l’Hexagone ont un niveau de vie égal à 100 %, soit le taux le plus élevé parmi les onze pays de l’OCDE étudiés par le COR. En Belgique et au Royaume-Uni, ce ratio est beaucoup plus faible : respectivement 77,2 % et 82,3 %. Il atteint près de 87 % pour les seniors allemands et dépasse légèrement 92 % pour les Américains de plus de 65 ans.
Mais la donne risque de changer, à l’avenir. En 2040, le niveau de vie moyen des retraités se situerait dans une fourchette comprise entre 83 % et 96 % du niveau de vie moyen de la population, suivant les scénarios envisagés par le COR (qui retiennent des taux de chômage et de croissance des revenus plus ou moins élevés). En 2060, ces ratios seraient plus bas encore, entre 74 % et 94 % (contre 106 % à l’heure actuelle).
Il s’agit là « d’évolutions relatives », insiste le COR. Quelle que soit l’hypothèse de croissance et de nombre de demandeurs d’emplois envisagée, le niveau de vie moyen des retraités s’accroîtrait. Mais moins favorablement que celui de l’ensemble des personnes vivant en France. Le phénomène serait en grande partie lié au fait que les pensions sont revalorisées en fonction des prix et non pas des salaires ; or, ces derniers devraient croître plus vite que les pensions.
Le Monde.fr | | Par Bertrand Bissuel