Les « subprimes » représentaient déjà la part la plus lourde de l’ardoise des banques auprès de la justice. L’amende de l’établissement allemand Deutsche Bank dans le dossier des prêts hypothécaires « pourris » pourrait encore venir alourdir la note, avec 14 milliards de dollars, soit environ 12,5 milliards d’euros. Le département de la justice a toutefois invité la banque à proposer une contre-offre.
La Deutsche Bank est accusée, comme d’autres établissements financiers, d’avoir vendu sur les marchés des produits dits « toxiques », parce que adossés à des crédits immobiliers dont il était presque certain que les emprunteurs n’auraient pas les moyens de les rembourser (en raison de leur faible solvabilité et à cause des taux variables extrêmement dangereux qui leur étaient imposés).
Les régulateurs, gendarmes des marchés et parquets spécialisés, semblent vouloir imposer des amendes proportionnelles aux dégâts causés par les spéculateurs. La crise des « subprimes » a en effet donné lieu aux amendes les plus importantes depuis 2007 et le début de la crise financière.
Si cette amende était confirmée, il s’agirait de la plus importante jamais infligée à une banque étrangère aux Etats-Unis, loin devant les 8,9 milliards de dollars de BNP Paribas, coupable d’avoir violé des embargos avec le Soudan, l’Iran et Cuba.
Les banques américaines ne sont pas épargnées non plus par leurs régulateurs nationaux : Bank of America a dû payer près de 40 milliards de dollars en quelques années dans des litiges liés à la vente des produits hypothécaires américains ainsi qu’aux saisies immobilières illégales qui ont suivi.
La croisade américaine
Les Etats-Unis sont en pointe dans la lutte contre les dérives des établissements financiers. Le pays concentre à lui seul 97 % de la totalité des sommes exigées de banques en guise de pénalités depuis 2007.
Ainsi la Deutsche Bank, qui est par ailleurs impliquée dans de nombreux litiges judiciaires partout dans le monde, avait déjà dû s’acquitter de près de 2,3 milliards de dollars dans des fraudes liées aux subprimes auprès des autorités américaines, entre 2010 et 2013.
Toujours aux Etats-Unis, elle a encore été condamnée à une amende de 2,2 milliards de dollars pour manipulations du taux interbancaire Libor en 2015. La banque a également réglé 258 millions de dollars pour rupture d’embargo, 55 millions pour irrégularités comptables, 31 millions de dollars pour évasion fiscale…
Les banques n’ont « pas suffisamment changé » malgré les amendes à répétition infligées à la profession bancaire aux Etats-Unis, a accusé récemment un responsable de la FED. « Trop de banques ne réagissent que lorsqu’il y a un problème, au lieu de mettre en place des mesures d’ensemble qui s’assurent que les employés comprennent ce qui est légal et éthique de faire », a déclaré Daniel Tarullo, qui dit également songer à infliger davantage « d’amendes personnelles » à des individus et des interdictions d’exercer.
Alors que les autorités américaines continuent de sanctionner les agissements des banques dans le dossier des subprimes, l’Europe se caractérise par son inaction. La Commission européenne, qui s’était distinguée en 2013 par une attaque inédite sur le Vieux Continent face aux abus sur le puissant marché des dérivés (1,49 milliard d’euros de pénalités, partagées entre huit banques), n’est pas intervenue dans le dossier des « subprimes ». En effet, elle ne peut infliger des amendes qu’aux entreprises qui enfreignent le droit communautaire.
« Les compétences de supervision prudentielle […] appartiennent exclusivement aux Etats membres et depuis deux ans aussi à la Banque centrale européenne pour la zone euro », justifie Michel Barnier, ancien commissaire européen aux services financiers (2010-2014), qui appelle à la création d’un poste de « procureur financier » européen.
LE MONDE | Par Mathilde Damgé
Un article interessant qui montre que les banques ont abusé de leur position dominante avant la crise des subprimes
Les autorités américaines ont décidé de poursuivre et de punir ces banques. Malgré cela, on s’aperçoit que les pratiques des banques n’ont pas fondamentalement changé. Elles cherchent les profits à tout prix. L’adage too big too fall, leur permet de minimiser les risques puisque la collectivité prendra en charge leurs erreurs. Le consommateur paye donc doublement ces pratiques des banques, une première fois en temps que contribuable et une seconde en tant que consommateur (moins de travail, moins de perspectives d’avenir …)
Shukuru