Lexique
La fluidité sociale correspond à une situation dans laquelle la position sociale d’un individu ne dépend pas de son milieu social d’origine.
Définition
La fluidité sociale correspond à une situation dans laquelle la position sociale d’un individu ne dépend pas de son milieu social d’origine.
La fluidité sociale est une notion qui veut mettre en évidence l’égalité des chances d’accès aux différentes positions sociales, quel que soit le milieu social ; toutefois, comme la situation de complète égalité des chances n’existe pas, les sociologues essaient de suivre l’évolution dans le temps de cette égalité des chances.
De ce point de vue, il est tout à fait possible que la mobilité observée augmente sans qu’il y ait plus d’égalité des chances. Supposons simplement que les enfants d’ouvriers voient leur chance de devenir « cadre » augmenter (plus forte mobilité observée), il se peut aussi que, dans le même temps, les chances de devenir « cadre » augmentent encore plus fortement pour les enfants de « cadre », le nombre de « cadres » ayant fortement augmenté. Dans ce cas-là, il n’y a pas véritablement amélioration de l’égalité des chances dans l’accès au statut de « cadre » entre les enfants d’ouvrier et ceux de « cadre ».
Indicateurs
Pour mesurer la fluidité sociale il faut donc comparer la plus ou moins grande égalité des chances d’accès à des positions sociales pour des individus appartenant à des catégories socioprofessionnelles différentes.
Concrètement on utilise ce que l’on appelle les odds-ratio. Prenons un exemple, celui de la destinée des enfants de « cadre » et des enfants d’ouvrier en France en 1993.
Sur 100 fils de « cadre », 7 sont devenus ouvriers et 53 sont devenus cadres ou professions intellectuelles supérieures. Dans ce cas, les fils de « cadre » ont 7,57 fois (53/7) plus de chance de devenir « cadre » plutôt qu’ouvrier. Regardons, ce qu’il en est pour les fils d’ouvrier : sur 100 fils d’ouvriers, 45 sont devenus ouvriers et 10 sont devenus « cadres ». Dans ce cas, les fils d’ouvrier ont 0,22 fois plus de chance (au sens statistique !) de devenir « cadre » plutôt qu’ouvrier (en fait, 4,5 fois plus de chance de devenir ouvrier plutôt que cadre !).
Faisons le rapport entre les deux précédents rapports : on obtient 7,57 / 0,22 soit environ 34. Ce chiffre signifie que les chances de devenir « cadre » plutôt qu’ouvrier sont 34 fois plus élevées pour les fils de « cadre » que pour les fils d’ouvrier. Ce calcul est un calcul d’odds-ratio.
Tendances
Regardons ce que sont devenus les fils d’ouvrier et les fils de « cadre » en France en 2003 (dernière année pour laquelle nous avons des données de l’INSEE) :
Pour les fils d’ouvrier, rien n’a vraiment changé : sur 100 fils d’ouvrier, 46 sont devenus « ouvriers » et 10 sont devenus « cadres » (rapport des chances toujours de 0,22 environ).
Pour les fils de « cadre », sur 100 d’entre eux, 9 sont devenus ouvriers (2 points de plus donc par rapport à l’année 1993) et 52 sont devenus « cadres » (1 point de moins par rapport à l’année 2003). Le rapport des chance est donc passé à 5,78.
L’odds-ratio est ainsi de 26,2 : les chances de devenir « cadre » plutôt qu’ouvrier ne sont plus que 26 fois plus fois plus élevées pour les fils de « cadre » que pour les fils d’ouvrier.
Si nous nous souvenons (voir la rubrique « Indicateur ») que l’odds-ratio était de 34 en 1993, on peut en déduire que l’égalité de chances et la fluidité sociale ont progressé de 1993 à 2003.
Évidemment, il faudrait faire ce type de calcul pour toutes les catégories socio-professionnelles. Selon L.A. Vallet, spécialiste français de ces questions de fluidité sociale, de manière générale, la fluidité sociale aurait augmenté de 0,05 % par an de 1953 à 1993 en France et elle se serait poursuivi jusqu’en 2003. voir Idées n°175, 2014)
Enjeux
Outre la question de la mobilité sociale et de l’égalité des chances dans une société démocratique (voir rubrique « enjeux » de la notion « mobilité observée »), l’enjeu est aussi celui de la meilleure mesure de l’inégalité des chances dans l’accès aux positions sociales disponibles dans une société. Ainsi, une progression de 1 ou 2 points dans les chances relatives d’accès aux différentes position sosicales se traduit par une forte hausse de la fluidité sociale, telle qu’elle est mesurée par les odds-ratios (voir rubrique « Tendance » et « En savoir plus avec l’article de P. Mercklé). Attention dès lors à ne pas se contenter de suivre la baisse mais aussi le niveau atteint par l’odds-ratio.
Erreurs Fréquentes
Croire que fluidité sociale et mobilité sociale sont synonymes : il peut y avoir mobilité sociale et inégalités d’accès aux positions sociales.
Croire que fluidité sociale et déclassement s’opposent (voir exemple dans la rubrique « Tendance » : l’augmentation de la fluidité sociale entre ouvriers et « cadres » de 1993 à 2003 provient d’une tendance au déclassement des fils de « cadre »)